Né en 1922 à Berlin, petit-fils du fondateur de la psychanalyse Sigmund Freud, Lucian Freud est mort paisiblement dans sa maison avec jardin de Notting Hill, à Londres, où il avait installé ses ateliers à l’étage. « Je veux que la peinture soit chair » disait l’artiste, résolument anticonformiste, ayant toujours souhaité dépeindre le monde à travers son regard, parfois brutal, mais surtout empreint d’une scandaleuse intimité.
Il y a un an, le Centre Pompidou lui consacrait une importante exposition composée de près de 50 peintures de large format, la plupart provenant de collections privées, de même que plusieurs dessins et photographies. Pour Lucian Freud, l’atelier est un laboratoire d’où il perçoit le monde extérieur tandis que ses modèles se succèdent à l’intérieur des murs de son studio. La scénographie précise de ses tableaux est aussi celle de son quotidien, tout comme les quelques paysages entrevus depuis la fenêtre – les cours arrières et les usines de Londres, les jardins et les quartiers dans lesquels il installe successivement ses ateliers, de Paddington à Holland Park en passant par Notting Hill.
La nudité chez Lucian Freud dépasse l’espace clos du tableau, il ne s’agit plus seulement de nus, mais bien d’une mise à nu radicale des êtres et des choses. La peinture de Lucian Freud, c’est une lumière crue et aveuglante, une lumière qui décèle sans pitié les failles de ses sujets avec une troublante netteté, et qui met également en exergue nos propres faillites, nos propres divorces, car la chair d’huile qui apparaît sur la toile, cette viande excédée par les chagrins, c’est d’abord la nôtre.
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À l’occasion de la rétrospective qui lui est consacrée, le Centre Pompidou a eu la bonne idée de publier un tout petit livre, d’une quarantaine de pages à peine, dont seulement cinq écrites de la main de Lucian Freud, en 1954, alors que la revue littéraire et artistique Encounter lui demandait de définir la peinture. Quelques réflexions sur la peinture, c’est un bréviaire de l’art selon le peintre britannique, qui a trente-quatre ans lorsqu’il affirme que « la peinture est le seul art où les qualités intuitives de l’artiste peuvent être plus précieuses pour lui que le savoir ou l’intelligence proprement dits. »